Pas obligatoire, mais tellement précieux ! Le doudou, superhéros du quotidien, a d’immenses pouvoirs dont celui, quasi magique, de rendre les séparations plus sereines. Explications, et conseils, à lire dans le supplément pour les parents du magazine Popi.
“Nin-Nin”, “Lapinours”, “Ticâlin”…
Le doudou porte mille noms, revêt mille formes, apaise mille pleurs. Lapin aux longues oreilles, lange coloré, T-shirt de Maman… Peu importe son allure : il sera d’autant plus précieux qu’il sera suçoté, tortillé dans tous les sens, traîné partout. Si votre enfant l’élit, il y a de fortes chances pour qu’il devienne son compagnon chéri et indispensable.
Qui ne s’est jamais retrouvé comme Laurène, maman de jumeaux de 14 mois prise d’une soudaine panique sur une aire d’autoroute, lançant à son conjoint éploré : “Dis, rassure-moi, on n’a pas perdu un doudou !?”
De même, “à la crèche, les enfants ne volent pas les doudous. Au contraire, bien souvent, ils courent rapporter son Lapinou à un camarade qui a un chagrin”, confie Anne-Cécile George, directrice de crèche, et auteure de La crèche est mon quotidien (Dunod).
Un doudou, ça se choisit
Pourquoi un tel attachement ? Donald Winnicott, le célèbre pédiatre anglais, a observé que le doudou apparaissait à une période particulière du développement du tout-petit. Les tout premiers mois, celui-ci considère les objets familiers – le sein de sa mère, le biberon présenté par l’adulte qui le nourrit – comme des extensions de son corps, faisant partie de lui. Mais vers 4 mois, le bébé franchit une étape cruciale : il comprend que sa mère est distincte de lui. Le choix du doudou a lieu à ce moment-là, à partir de 4 mois.
Un doudou, ça fait du bien
Avec cette fantastique découverte surgit aussi une inquiétude. Si la mère – ou l’adulte qui nourrit et soigne depuis les premiers jours – est une personne à part entière, serait-il possible qu’elle s’en aille ? “Tout être humain a peur d’être abandonné. Toute séparation entraîne de l’angoisse”, explique la pédiatre Françoise Ceccato (auteure de Questions-Réponses autour de l’angoisse de séparation, 0-3 ans, Mango).
C’est là que le doudou entre en scène ! “Il aide à penser l’absence”, souligne joliment la psychologue Annick Simon (auteure de Accompagner le développement du petit enfant, Dunod). Il répond à un besoin profond du tout-petit : le rassurer au cours des inévitables premières séparations. En le choisissant, l’enfant le dote de pouvoirs magiques : retrouver l’odeur de Maman, adoucir la séparation temporaire, affronter l’inconnu. C’est Winnicott qui a désigné le doudou d’une formule restée célèbre : “objet transitionnel”. Il fait le lien entre deux mondes : celui du bébé et de l’adulte, de la maison et de l’extérieur, du connu et de l’inconnu.
Un doudou, ça se respecte
Cela dit, si votre enfant échappe à “la folie doudou”, pas de panique ! Cela signifie qu’il n’a pas besoin d’un objet pour se rassurer, ou qu’il a trouvé une autre façon de le faire : en tripotant ses cheveux, par exemple, ou en suçant son pouce, devenu une sorte de “doudou intégré” ! Car ce n’est pas tant l’objet qui rassure, mais ce qu’il représente.
Pour qu’il fasse bien son travail de “transition”, le doudou doit aller et venir entre la maison et l’extérieur. Quitte à se salir ou… à se perdre. “Il doit se recharger en odeur et en pouvoirs”, explique fermement Anne-Cécile George. Place, donc, à un doudou unique (oui, oui, c’est dur !) et pas à un doudou dans chaque lieu.
Par ailleurs, pour conserver ses superpouvoirs, il est important que le doudou soit réservé à sa tâche principale : accompagner les transitions. On ne l’utilise donc pas pour sécher les larmes de son bout’chou si on est là. Car même un Lapinou “superfort-supermagique” vaudra toujours moins que les bras des parents. “Il marque les débuts de l’autonomie psychique de l’enfant, car il est le premier objet qu’il choisit”, rappelle Annick Simon. Alors respectons ce choix, et l’intégrité de Doudou. Lavez-le avec parcimonie, car l’odeur est un puissant évocateur de souvenirs.
Romain, 35 ans, raconte : “J’associe toujours Mattéo, mon fils de 2 ans, à la toilette de son doudou, en lui demandant : ‘Tu viens m’aider à mettre Toupitou au bain ?’” Dans le même esprit, réparez Doudou avec mesure, sauf en cas de danger majeur, comme oreille ou patte déchirée !
Un doudou, ça peut s’oublier
Le doudou de votre bébé est à la fois son meilleur ami, son confident et son armure protectrice. Le petit lui confie ses joies, ses peurs, ses chagrins, mais aussi ses rêves et ses secrets. Pour autant, les spécialistes sont formels : pas de danger d’addiction aux doudous ! Au contraire : si, grâce à eux, les petits traversent sans encombres les premières séparations, il leur sera plus facile d’aborder les suivantes.
En grandissant, au cours de sa troisième année notamment, l’enfant se concentrera sur l’action, les jeux, les relations aux autres… Peu à peu, il oubliera Doudou à la maison, ou chez Mamie. Sauf s’il est tout petit, ne courez pas le chercher : il y a de grandes chances qu’il réalise ainsi qu’il est assez fort pour s’en passer. Même si, devenu grand, il retrouvera un peu de son Lapinou chéri quand il écoutera un morceau de musique ou contemplera un paysage… Oui, le doudou est bien cette petite clé magique qui ouvre les portes de la confiance et de la vie intérieure…