Dans un climat de confiance, un enfant peut très vite développer son sens de l’humour ! Des chatouilles aux jeux de mots, le magazine Popi vous révèle l’art et la manière de faire rire votre tout-petit !
L’attrait de la surprise
Au commencement était la chatouille. De préférence sur le ventre, les petits pieds, ou dans le cou. Le bébé, dès 4 mois, résiste difficilement à ces petits stimuli qui lui taquinent les sens. Le toucher, mais aussi l’ouïe avec le vrombissement du classique “bisou-prout”, ou encore la vue avec la grimace qui déforme un instant le visage de Papa.
Sur la peau, la chatouille surgit on ne sait quand, même si le jeu a déjà commencé. Quand monte la petite bête, le bébé rit de la chatouille mais aussi, très vite, de son anticipation. Deux doigts qui se baladent près de lui suffisent à le faire glousser d’excitation.
Le délice de la répétition
La répétition offre un cadre rassurant, propice au rire. Mais l’inquiétude, voire la peur, sont aussi de la partie. Le rire naît de leur soulagement. Doudou a disparu ? Ah non, le voilà ! C’est le fameux “caché-coucou”, répété avec délice dès 8-10 mois. Dans son livre Les bébés de l’humour (Pierre Mardaga éditeur), la pédopsychiatre Paule Aimard cite l’exemple d’un bébé désarçonné de voir sa mère la tête couverte de shampoing. Elle lui parle, désamorçant la peur, et le voilà qui rit. Au jeu du “Je vais t’attraper !” ou “Je vais te manger !”, la frontière est mince entre rigolade et frayeur, même si le petit en redemande…
La joie de l’insolite
Bien calé dans ses routines, le bébé s’étonne, et s’amuse parfois, de ce qui s’en écarte. “Coline rigole quand on fait les idiots, remarque Juliette à propos de sa fille de 8 mois. Par exemple, quand je marche à quatre pattes comme un dinosaure en faisant des bruits bizarres. Mais si je recommence le lendemain, elle ne va pas forcément rire !”… Déjà blasée par sa maman dinosaure ? Lily-Maï, 1 an, rit des pitreries de sa sœur qui “se cache, fait des grimaces ou des danses étranges. Elle est bon public, mais rit davantage avec sa sœur qu’avec d’autres enfants, sans doute parce qu’elle est plus à l’aise”, note son papa Théo. Le climat de confiance est indispensable pour que le petit se réjouisse de l’insolite, du surprenant ou de l’effrayant.
Le jeu du détournement
Drôle de ressort que le rire ! Pour Paule Aimard, “l’humour naît à l’interférence de deux plans”. À la frontière entre le familier et l’inconnu, le rassurant et l’effrayant, l’habituel et le bizarre… le champ de l’enfant s’élargissant à mesure qu’il maîtrise des habitudes, des usages, des mots, des concepts. “Le rire du petit se nourrit de répétitions et de variations, observe Laurent Dupont, codirecteur du festival de théâtre “Premières Rencontres”. Le détournement n’amène le rire que s’il renvoie l’enfant à quelque chose qu’il a vécu ou éprouvé.” Un comédien qui utilise un parapluie ou une assiette fera rire un petit spectateur… si celui-ci connaît l’usage habituel de ces objets.
Le régal de la transgression
Téléphoner avec une éponge, enfiler son pantalon sur sa tête, se laisser appeler “Madame Prout »… Cela peut suffire à provoquer de bonnes tranches de rigolade. S’ajoute le plaisir de constater que même les grands font des bêtises, ou qu’on peut les taquiner… pour rire. Il y a un parfum de transgression dans l’humour, chez les grands comme chez les tout-petits, et passer par l’humour est une manière de jouer avec les limites, de les éprouver, les franchir ou mieux les accepter. “Lily-Maï rit quand elle appuie sur le bouton de la machine à laver, et que ça fait un bruit. Ce qui l’amuse aussi, c’est de faire quelque chose d’interdit”, note son papa, pas dupe pour un sou…
Béatrice, elle, se souvient d’un jour où son mari, pour signifier aux enfants de mieux se tenir à table, avait adopté toutes sortes de positions incongrues : debout sur sa chaise, vautré dans l’assiette… “à chaque fois, il disait aux enfants : “On ne se tient pas comme ça ! On ne se tient pas comme ça !” Ils étaient morts de rire. Et depuis, dès qu’on demande à Abel de mieux se tenir, il reprend toutes les positions montrées par son père en répétant : “On ne se tient pas comme ça !” Un clown est né, pour le plaisir de faire rire à son tour – ou en tout cas essayer !
Le plaisir du partage
“Depuis qu’elle a 2 ans, Prune tente de nous faire rire, témoigne Théo à propos de son aînée. Ce n’est pas forcément là qu’elle est la plus drôle, mais on l’encourage. Comme elle parle français et mandarin, elle fait des jeux de mots entre les deux langues. Cette finesse d’esprit qui apparaît, c’est beau à voir !” Les meilleurs encouragements à développer son humour, ce sont les rires des proches. Même si, pour aider son enfant à adopter ce regard créatif et décalé sur le monde, il faudra aussi en passer par “Madame Prout” dès le petit déjeuner.