Jouer, c’est amusant… mais c’est aussi très important. En construisant des tours de bois ou en babillant avec sa peluche, votre enfant acquiert des compétences indispensables, qui l’aident à grandir. Explications et conseils pour accompagner le développement de votre tout-petit, extraits du supplément pour les parents du magazine Popi.
S’amuser de tout, tout le temps
Gaëlle et Corentin, parents de Gaspard, 2 ans et demi, en rient encore : “Pour le premier vrai Noël de notre fils, l’année dernière, nous avions acheté plein de jouets : un train à tirer, des cubes à empiler, des formes de bois à encastrer… Mais soudain, alors qu’il ouvrait ses cadeaux, Gaspard a filé dans la cuisine.” Les deux parents l’ont retrouvé là, s’amusant comme un petit fou… à taper sur un saladier en plastique avec une cuillère en bois !
Gaspard, grands yeux bruns facétieux, a tout compris : le jeu est pour chaque enfant, dès son plus jeune âge, une seconde nature. Les tout-petits jouent avec tout, tout le temps : en mangeant, en rampant, sur leur table à langer ou avec le collier de Mamie. “C’est leur mode naturel d’appréhension du monde, leur façon d’entrer en contact avec le réel”, explique la psychologue Anne Bacus, auteure notamment du Grand Guide de votre enfant de 0 à 3 ans (Marabout, 2016).
Je joue donc j’apprends
Mieux encore : jouer leur permet d’explorer et de comprendre le monde. Quand on dit à un tout-petit : “Ne joue pas avec la purée !”, il est en fait en train de découvrir la texture souple et molle, le goût, l’odeur de l’aliment. “Le jeu est pour lui une forme d’apprentissage”, résume Jérôme Prado, chercheur en neurosciences au CRNL (Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon, Bron), qui rappelle qu’on “n’apprend jamais mieux qu’en cultivant l’aspect ludique”.
Le tout-petit apprend même sans s’en rendre compte. « Quand il entend “1, 2, 3, caché !”, il découvre et se familiarise avec une suite ordonnée de chiffres », fait remarquer Anne Bacus. Car dans la toute petite enfance, la plasticité du cerveau est extrême. “Avant 3 ans, les connexions cérébrales se multiplient de façon très rapide. Et le cerveau fait un gros travail de tri pour ne garder que les plus efficaces”, précise Jérôme Prado, qui qualifie ces années de “moment extraordinaire” : apprentissages et jeux ne sont pas encore séparés, comme ils le seront au fur et à mesure que l’enfant grandira, particulièrement à l’école.
Les bébés, chercheurs en herbe
La méthode du tout-petit, c’est l’expérimentation. “Si on lui laisse la liberté d’inventer, c’est un remarquable chercheur !”, s’amuse Fabienne Ferrandini, directrice pédagogique et du développement du groupe de crèches Plaisir d’enfance. Il observe, tâtonne, recommence, vérifie, ajuste… Une vraie démarche scientifique ! “Le jeu est indissociable de l’expérimentation”, précise de son côté Camille Thorneycroft, directrice des marques du groupe Lego, dont les gros cubes colorés invitent justement les enfants “à faire eux-mêmes”, dès leur premier âge.
Tous les jeux qui encouragent ainsi l’enfant à entreprendre par lui-même sont précieux pour son développement. Même si cela ne vous apparaît pas à première vue en contemplant le fouillis sur le sol de sa chambre ! En réalité, en mélangeant briques, habits de poupon et instruments de docteur, l’enfant associe, invente… bref, booste sa créativité. Voilà aussi pourquoi les stars de ces toutes jeunes années sont les jeux de construction et d’empilement. Les aptitudes qu’ils demandent – saisir, manier, faire rouler… – favorisent la motricité fine et l’agilité du corps. Emboîter des blocs de plastique colorés ou empiler des barres de bois stimule même le goût des maths ! “C’est la même partie du cerveau – le cortex pariétal – qui est mobilisée dans la capacité à se représenter l’espace et à raisonner mathématiquement”, explique en effet Jérôme Prado.
Les règles du jeu
Et, magie de la petite enfance, cette tour de cubes ne pourrait-elle pas devenir un restaurant, une fusée ou un château fort ? Par le jeu, en créant son monde, en s’imaginant docteur ou boulanger, autour de 2 ans, votre enfant apprivoise son autonomie, développe son langage, construit son jugement, se met à la place de l’autre… Ces jeux symboliques, d’imitation, apprennent au petit à grandir en harmonie avec ceux qui l’entourent. Les jeux les plus simples sont ainsi les plus précieux. “Gros crayons, pâte à modeler, papier, ustensiles simples… L’essentiel est de proposer un support pour que l’enfant puisse laisser libre cours à son imaginaire”, conseille Fabienne Ferrandini.
Et pour apporter tous ces bienfaits, le jeu doit rester… un jeu : “Attention à ne pas se montrer intrusif. L’adulte doit accepter de se laisser guider par l’enfant dans son monde inventé, sans juger, sans commenter, sans proposer autre chose, sans définir les règles a priori”, conseille Grégoire Ensina, coordinateur pédagogique de Plaisir d’enfance.
Vous n’aimez pas jouer ? Ne culpabilisez surtout pas ! “Il est important d’être à côté de votre enfant, mais pas obligatoirement pour partager son activité”, poursuit Grégoire Ensina. Faites-le participer à votre activité (jardinage, cuisine…), inventez et partagez une histoire le soir, prenez-le dans vos bras pour un doux moment… L’essentiel, même dans le jeu, c’est la relation. Et il y a tant de façons de “jouer” !
Pour aller plus loin
Retrouvez le podcast La pause parents du magazine Pomme d’Api, animé par Sophie Marinopoulos, psychologue et psychanalyste, sur le thème “Jouer avec rien… c’est déjà beaucoup !” À écouter sur toutes les plateformes de podcast et sur la chaîne YouTube du magazine Pomme d’Api.